Qui sont les crocodiles dans l’oeuvre de Ludovic Obiang?
Qui sont les crocodiles ?
Voila la question que je me suis posée en lisant le titre du recueil de nouvelles de Ludovic Obiang. Et il m’a fallu lire entre les lignes pour tenter de comprendre de qui il s’agit?
Ce que je peux vous dire c’est qu’ils sont nombreux. Et leur nombre ne cesse de croître face à la misère que l’on imagine à tort ou à raison grandissante. De quelles misères s’agit-il ? Elles sont diverses et touchent de nombreux secteurs de la vie courante. Et pour palier à cette défaillance, nombreux s’imaginent que l’exil dans des pays »réputés » développés constitue le parachute qui leur permettra d’atterrir en leur terre d’origine en véritable héros, au cours des voyages qu’ils effectuent, une fois par an, tous les deux ans, tous les trois ans …
Mais voilà, la réalité est toute autre sur le terrain, » ceux qui sont restés au pays ne sont pas des ignorants ou des incrédules », ils savent que la vie n’est pas facile, mais ils s’accordent à vivre en faisant le mieux qu’ils peuvent pour ne pas être absorbés par l’impôt familial, par des attitudes alimentaires, intellectuelles, professionnelles »simplistes »…
Ceux qui optent pour l’exil définitif se surprennent parfois à vivre dans un monde où ils n’ont aucune attache réelle et n’ont pas pu se réaliser non plus dans leur pays d’origine. Laissant derrière eux tout ce qui fait leur être, ils se rendent compte la cinquantaine passé ailleurs (Europe, Amérique, Asie) qu’ils n’ont rien fait de consistant. Parfois, ils n’ont même pas pu se construire un petit nid douillet dans la grande forêt équatoriale, léguée par leurs ancêtres et qui n’attend qu’eux. Ils comprennent trente ans après leur installation en terre d’accueil qu’ils peuvent bénéficier de quelques privilèges climatiques , médicaux, etc.… Mais que cela n’est pas toujours suffisant. Venus en détail, ils font partie d’un » bétail » en dehors duquel leur épanouissement est mi-mangue mi -raisins pendant ces longues années « extérieures »
Gangrenés par le manque de chaleur, de reconnaissance dans la rue, d’un simple « bonjour » long et chaud, gagnés par le poids des années et l’incapacité de commencer à 0, lorsque les collègues de classes, les amis d’une même génération sont déjà à 10, les crocodiles se mettent à pleurer et à comprendre que leur choix pour l’exil n’a pas été aussi fructueux qu’ils veulent le laisser croire. Les voilà à présent larmoyant en secret et rongés par »un si je savais » ( culpabilité) qui ne leur permettra pas de saisir le taureau par les cornes et de se dire » il n’est jamais trop tard », il faut que j’aille sur le terrain, non pas pour montrer aux yeux du monde et à moi même que je porte des costumes et des sacs de grandes marques, onéreux, mais me faire mon lieu d’accueil, de retrouvailles avec les miens et moi-même. Cet effort de dépassement n’est possible que lorsque l’humilité, la modestie, la capacité à être simple et à faire de grande chose s’accompagne d’une détermination valable et sévère ( pour soi même).
Sans cette prise de conscience, les années passent et le désenchantement est visible. Ils n’en peuvent plus, ces crocodiles qui ont peur d’avoir honte chez eux, parce que n’ayant rien réalisé là-bas et parfois embarqués et embourbés dans des difficultés financières tant imprévues que prévues et garanties par un système de vie dans le pays d’accueil que même les »locaux » les ‘indigènes », les autochtones de ces grands pays ne maîtrisent même pas ( Crise de l’immobilier actuelle). Ne pouvant que s’offrir des pates comme repas quotidien, ils maugréent leurs chagrins et essaient de se distraire devant des feuilletons télévisés tant insipides que fades. Ces derniers, parlent d’amour à l’eau de rose, de violences conjugales, de crimes, de meurtres. Dégoutés par ces horreurs qui ne les font pas jouir, les crocodiles »ruminent » leurs ennuis et s’ennuient cloitrés dans leurs appartements. Ils recherchent ce rire chaud, humain. Mais ne le trouve pas. Quel gâchis!
Ils essaient de contenir leurs peines, en pensant à un avenir meilleur dont le bout du nez ne se laisse pas voir à l’horizon. Meurtris, ils se laissent griser dans une vie d’apparence. Seul cet écrivain a osé indexer ouvertement la question que tout le monde se pose en sourdine tout en sachant la réponse: Et si ils pleuraient pour de vrai… Personne ne veut le croire, nul ne peut le croire. Pourtant, même après avoir passé trente ans sous les eaux, un crocodile ne pourra jamais se transformer en caïman et jouer dans la même cour qu’un crocodile pour le disign : lacoste.
Mon grand père ne disait-il pas qu’il vaut mieux avoir un petit chez soi chez soi, qu’un grand chez soi chez autres. Il n’est pas interdit de se rendre visite, de se dépanner en cas de »morceaux durs » à avaler tout seul. Il ajoutait
Mais il vaut mieux s’assurer d’être assis sur la branche d’un arbre qui pousse sur sa propre cour que sur celle du voisin.
Pourquoi?
Lisons les autres nouvelles pour mieux répondre. Mieux encore, disons des mots plus longs sur d’autres crocodiles.
je tenais à dire que j’ai beaucoup aimé l’article sur les crocodiles.
j’ai lu je crois, toutes les oeuvres de Ludovic Obiang.
pour avoir eu la chance récemment de rencontrer l’écrivain, je reste étonnée de voir combien cet homme est simple et ouvert.
c’est peut-etre cela la force de l’écrivain: plutot que de s’enfermer dans une tour d’ivoire, etre ouvert sur le monde.
E.M.A.
bonjour, j AI Apprécié ton article et je pense de ce faite , qu’il faudrait une prise de conscience collective pour ces crocodiles. aussi,prévoir des mesures d’accompagnements pour ces derniers.
sinon pourquoi sont ils en exil ?